Flourish — Sarah Hennies

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Dès le début de la pièce, Flourish de Sarah Hennies pour deux vibraphonistes nous entraîne dans un monde sonore nouveau, extraordinaire, et mystique. Ce qui est si énigmatique dans cette pièce, c’est qu’une grande partie de la musique se déroule dans un domaine de timbres qui va au-delà de ce qui est écrit et de ce qui est joué. La partition est précise et nette, à la manière minimaliste des cellules répétitives à mesure unique, et les réverbérations atmosphériques produites par le vibraphone sont ici laissées à elles-mêmes pour écrire leur propre contrepoint.  

Sarah Hennies dit de cette pièce que « la “ répétition ” se déploie et évolue réellement au fil du temps, ce qui est un phénomène que je ne comprends pas totalement... J’ai travaillé avec du matériel qui ressemble à première vue à une répétition statique, mais qui est, en fait, une musique qui évolue en changeant au fil du temps (soit acoustiquement/physiquement, soit perceptivement, soit — généralement — les deux) ». (courriel à l’auteure)

En raison des capacités uniques du vibraphone, du toucher de chaque musicien et des propriétés acoustiques de la salle dans laquelle le morceau est joué — y compris la forme et la taille de l’auditoire — on peut supposer qu’un nouveau morceau peut émerger à chaque représentation. Si l’on dit souvent cela des performances musicales en direct en général, c’est peut-être plus vrai pour cette pièce particulière que pour la plupart des autres. Ce qui se passe s’apparente à de l’improvisation, mais le son s’improvise lui-même de manière variable et fascinante. 

À propos du vibraphone

Les vibraphones sont des instruments de percussion à clavier, souvent utilisés dans la musique de jazz et les ensembles de percussion. Ils se composent de barres métalliques accordées, suspendues au-dessus de tubes résonateurs dotés d’ailettes motorisées au sommet. Cette caractéristique unique produit un vibrato ou un trémolo d’un autre monde. De plus, le vibraphone possède une pédale de résonance, comme un piano, ce qui augmente la capacité de l’instrument à produire des sons auxiliaires. Les barres sont généralement frappées à l’aide de baguettes dont l’extrémité peut être en caoutchouc, en caoutchouc entouré de fil ou en caoutchouc entouré de corde. Comme les vibraphones ont des barres en métal, ils peuvent également supporter des mailloches faites de substances plus dures comme le bois ou le laiton. Ce qui est plus intéressant encore, ils peuvent être joués à l’aide d’un archet de contrebasse.  

Les vibraphones produisent des harmoniques, dont la première est à deux octaves et demie au-dessus de la fondamentale (la hauteur principale de la barre frappée ou jouée à l’archet), que les joueurs apprennent à produire avec soin. La flexion de la hauteur, comme on l’entend dans le début de Flourish, est également possible. Le vibraphone, à bien des égards, repousse les limites de notre idée reçue des instruments à percussion, de la musique notée et du son lui-même. Hennies, en parlant des capacités du vibraphone, a décrit son timbre comme étant « très complexe, riche et imprévisible ». (courriel à l’auteure)

À propos du minimalisme

Le minimalisme en musique classique est né de la scène avant-gardiste du New York des années 1960. Des compositeurs américains tels que Philip Glass et Steve Reich sont largement associés à ce genre. Le minimalisme fait souvent appel à des motifs courts et répétés, dont on dit parfois qu’ils serpentent, sans se presser pour atteindre un objectif mélodique particulier, mais plutôt pour se délecter du son lui-même. Il s’agit d’une musique rythmiquement enivrante, subtilement fluide et plutôt envoûtante. La musique de Reich figure souvent sur les listes de musiques par lesquelles se laisser emporter en rêveries. Comme l’a dit Michael Colonna, commentateur sur YouTube, à propos de Six Marimbas de Reich, « Mes enfants me prenaient pour un fou, mais quand Drum and Bass est arrivée, ils ont fini par comprendre ». 

À propos de Sarah Hennies

Née en 1979 à Louisville, dans le Kentucky, Sarah Hennies s’est imposée comme une voix majeure de la musique contemporaine d’avant-garde, dont l’œuvre est politique, psychoacoustiquement difficile, rythmiquement vive, et à la fois touchante et humoristique. Ses pièces s’apprécient le mieux en direct, car elles s’accompagnent souvent d’un matériel visuel intéressant, comme dans Falsetto et son film Contralto, et peuvent changer de manière considérable avec les variables du temps et de l’espace dans une performance en direct, comme dans Flourish. Ses œuvres ont été jouées dans le monde entier et elle est active en tant que percussionniste dans une variété de styles musicaux. 

http://www.sarah-hennies.com/

par Juanita Marchand Knight

Photo: Micke Keysendal

Photo par: Micke Keysendal

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